1892

 

 

Vendredi 1er Janvier

Mort de ma tante Jannet. Ma tante s'éteint sans aucune souffrance vers 2heures du matin. Elle était âgée de 80 ans.

Dimanche 3 Janvier

Enterrement de ma tante Jannet.

Jeudi 14 Janvier

Nous allons patiner à Fontenay/Bois, Charles, Louise, Henri, Paul, André et moi avec les Malassez. Jean et Henriette Malassez font leurs premiers pas sur la glace. Nous rencontrons sur le lac Mme Vaillant, ses 2 filles Elisabeth et Clémentine et le plus jeune fils Louis. Excellente journée. Glace superbe. Partis par le train de 1h nous rentrons vers 5h.

Samedi 30 Janvier

Par arrêt de ce jour je suis nommé architecte diocésain de Blois. Guadet titulaire de Rennes est nommé en plus à St Brieuc.

Dimanche 31 Janvier

Dans leur réunion de ce jour les membres de la Société d'aquarellistes "Les Amants de la Nature", sur la présentation de Mayeux et de Deslignères et après examen d'aquarelles envoyées par moi, m'élisent à l'unanimité membre de la société. Lettre aimable du Président Ch. Gautier m'annonçant cette nouvelle. La société se compose d'architectes, anciens élèves de l'E.D.B.A., et qui sont: Bobin, Cousin, Dainville, Deslignères, Ewald, Gagni, Galeron, Ch. Gautier, Julien, Lafargue, Letertre, Mayeux, Parent, X, Robert de Massy et Viennois, soit 16 membres. On me dit que Bobin et Julien sont démissionnaires.

Jeudi 4 Février

Emile un peu plus souffrant (les deux petits frères sont très enrhumés depuis quelques temps) Sophie prie le Dr Bruslé de le venir voir. Le Dr Bruslé malade se fait remplacer par M. Daudel. Le médecin ne voit encore rien de déclaré, il craint peut-être une rougeoie.

Samedi 27 Février

Je vais avec Sophie et Louise au vernissage de l'Exposition des Amants de la Nature. Nous nous rencontrons avec mon père, Adèle et Anna à qui je ménage la surprise de lui offrir une aquarelle exposée et portant une dédicace à son intention; idem à Malassez (Cour des Comptes). Charles et Henri invités par leur oncle Henri vont passer à Rouen leurs congés des jours gras. Je les accompagne à la gare pour le train de 9h2O le soir.

Dimanche 28 Février

Ouverture de l'Exposition des Amants de la Nature.

Louise va avec sa maman à l'0péra-Comique entendre Zampa et Sulla Monk. Elle revient tout exaltée. C'est la première fois qu'elle va à l'Opéra-Comique. Le soir Louise Paul et André dînent chez leur bon-papa. Nous restons seuls Sophie et moi à dîner en tête à tête, ce qui ne nous est pas arrivé depuis bien longtemps. Le soir nous allons à l'Institut rejoindre la famille et ramener nos enfant.

Nos deux petits chéris ont 3 ans. Quelques unes de leurs expressions: Zolle pour Georges, Mi ou mimil pour Emile, dutôqué pour de l'eau sucrée, Pauine pour Pauline, Henette pour Henriette, Caïcot pour haricot, Cronolle pour croquignolles (on les aime beaucoup les croquignolles, aussi quelle consommation!)

Georges au retour d'une promenade au Luxembourg me montre en geignant son genou un peu écorché. Emile m'explique: Tombé paterre Zolle dans l'sembourg.

Des graphies pour des photographies, égader pour regarder, Salotte pour Charlotte, lain pour vilain, doux pour gentil, trop pour beaucoup (donne m'en trop), bômètre pour baromètre, ma petite bourette pour ma petite brouette.

Mardi 1er Mars

Nous déjeunons chez Malassez. Après déjeuner Malassez emmène nos enfants avec les siens au cirque de la rue St Honoré. Mon Père, Jeanne et Pierre et leurs enfants viennent dîner à la maison.

Mercredi 2 Mars (mercredi des Cendres)

Charles et Henri rentrent à midi de leur excursion à Rouen. Rentrée au lycée 2h1/2.

Samedi 5 Mars

Charles Rivière ayant reçu les coupons de la loge de M. Garnier a la gracieuseté de nous offrir deux places. Nous entendons Sigurd de Reyer. Très intéressante soirée avec cette particularité que la loge étant placée sur la scène on assiste après le tomber de rideau à toute la cuisine du théâtre, préparation des décors, laisser-aller des acteurs, mélange d'habits noirs avec les costumes, etc...

Jeudi 10 Mars

Enterrement de Mme L.Lalanne décédée le 7 Mars à l'âge de 72 ans.

Mercredi 16 Mars

Enterrement de M L.Lalanne décédé le 12 Mars à l'âge de 80 ans 5 jours après sa femme. Service à St Sulpice, inhumation à Bourg la Reine.

Jeudi 24 Mars

Mi-Carême. Nous conduisons Emile et Georges au Jardin des Plantes. Temps splendide. Enchantement des enfants, Georges est particulièrement exalté. Le gros "Léphant" ou le gros "Léléphant" qui a une "bouche par derrière" a un succès énorme. Je vais ensuite faire un tour sur les boulevards, foule immense bataille de confettis, innovation de cette année. Les confettis italiens sont de petits morceaux de plâtre, les confettis français sont de petites rondelles de papier blanc ou de couleur de 5 millimètres, environ découpés à l'emporte-pièce. Le blanc domine. Ils ont cet avantage sur les confettis italiens que, jetés au visage, ils ne font aucun mai et voltigeant en l'air ils produisent un effet charmant. Ils se prennent dans les cheveux et frisons des femmes, certaines sont tout à fait gentilles ainsi. Nombreux chars et déguisements.

Le soir je vais seulement sur le Boulevard St Michel; grande animation, grande gaîté, beaucoup d'esprit chez certains déguisés, parades, chants etc... Cela remplace agréablement les affreux "chienlits" qui il y a quelques années circulaient seuls dans les rues.

Vendredi 25 Mars

Dîner des Amants de la Nature chez Lapérouse. Etaient présents: Gautier président, X vice-président, Deslignères, Dainville, Viennois, Leteurtre, Bonnier, Parent et moi. Soit 11 convives. Manquaient: Gagni, Laffargue.

Dimanche 27 Mars

Nouvel attentat à la dynamite. Explosion rue de Clichy. Maison N°39 et 2 rue de Berlin éventrée. L'explosion se produit à 8h du matin, plusieurs personnes blessées. Des explosions avaient eu lieu précédemment à l'Hôtel de la Princesse de Sagan, au Boulevard St Germain N"136 et à la caserne Lobau.

On est à la recherche de l'anarchiste Ravachol que l'on croit être l'auteur de ces attentats.

Jeudi 31 Mars

Arrestation de l'anarchiste dynamiteur Ravachol.

Jeudi 7 Avril

Nous recevons à dîner la famille Vaillant: M et Mme Vaillant, Mlles Elisabeth et Clémentine, MM Albéric et Louis, la famille Lambert, Antoinette et ses 2 filles Valentine et Clarisse (au dernier moment Arthur retenu à l'audience du Tribunal de Rambouillet avait télégraphié qu'il ne pouvait venir) et mon Père. Nous avions espérer avoir également mon frère Henri, mais il a été obligé de remettre son voyage au lendemain. Après le dîner Antoinette se met au piano et exécute du Chopin avec une virtuosité et une émotion vraiment merveilleuses

Mardi 12 Avril

Le temps est si beau depuis une dizaine de jours que je décide Sophie à aller aux Petites Dalles avec les enfants pour les congés de Pâques. Les congés commencent ce soir à 4h et durent jusqu'au Lundi de Quasimodo.

Mercredi 13 Avril

Matin 8h départ de Sophie avec les enfants et 2 bonnes, Pauline et Henriette. La cuisinière Marie quitte le même jour la maison devant se marier dans quelques jours.

Le soir je dîne avec Père à l'Institut. Le temps semble devoir changer.

Jeudi 14 Avril

Je vais passer la journée à Villarceaux sur la demande de M. Cartier. Le temps devient pluvieux et froid. Je rentre à Paris vers 5h1/2. Je dîne chez Jeanne à Passy.

Vendredi 15 Avril

Le soir à 6h49 départ pour Rouen où je vais coucher afin de prendre le 1er train pour Cany le lendemain.

Samedi 16 Avril

Départ pour Cany. Temps froid. A Motteville bourrasque de neige. Idem à Cany. J'arrive aux Dalles vers 10h1/2, L'après-midi est belle le soleil est même chaud. Nous allons nous promener dans les avenues.

Dimanche 17 Avril (Pâques)

Matin nous montons à Sassetot par la neige. Après-midi promenade sur la route de St-Martin par la pluie.

Lundi 18 Avril

Le froid continue mais l'après-midi est assez belle, il fait même assez bon au soleil. Promenade sur la plage et sur la route de St Martin.

Mardi 19 Avril

Matin 8h1/2 je retourne à Paris où j'arrive à 4h1/2. Je me fais conduire directement au chantier de l'Ecole Massillon.

Lundi 25 Avril

Les anarchistes font sauter la maison du restaurant Véry où Ravachol a été arrêté. Nombreux blessés, Véry très grièvement ainsi qu'Hammond un ouvrier qui consommait près du comptoir (Véry et Hammond meurent plus tard de leurs blessures après 15 jours environ de souffrances).

Mardi 26 Avril

Ravachol et ses complices passent devant le jury de la Seine. Par suite de la lâcheté de certains jurés qui ont peur Ravachol n'est condamné qu'aux travaux forcés à perpétuité ainsi qu'un nommé Simon dit Biscuit, un ??? personnage, son principal complice. Trois anarchistes sont acquittés! Admirable et énergique réquisitoire du procureur général Quesnay de Beaurepaire.

Jeudi 28 Avril

A 8h du soir départ pour St Brieuc où j'ai rendez-vous avec M. Guadet pour lui remettre le service d'architecture diocésain de St Brieuc.

Vendredi 29 Avril

Arrivée à St Brieuc 6h15 du matin visite à M. Maignan Photographie à la cathédrale. Déjeuner chez M. Maignan. Après déjeuner photographies en ville. A 6h arrivée de Guadet.

Samedi 30 Avril

Matin avec Guadet et M. Maignan visite de la cathédrale et de l'évêché. Visite à l'évêque, Mgr Fallières, et au préfet, M. Granet, avec M. Guadet. Déjeuner au buffet de la gare avec MM. Guadet et Maignan. A 1h15 je pars pour Paris où j'arrive à 11h35.

Dimanche 1er Mai

Le 1er Mai que l'on annonçait comme devant être très agité ne donne lieu à aucune manifestation. Paris est calme, un peu triste même, car dans les rues on rencontre beaucoup moins de monde qu'à l'ordinaire. Le bourgeois généralement badaud n'oserait-il pas sortir de chez lui? Les mesures de répression ont été parfaitement prises, les casernes et monuments publics sont bondés de troupes en tenue de campagne, mais il n'y a rien d'apparent au dehors pour éviter toute provocation.

Jeudi 5 Mai

Première communion de Paul au Lycée Montaigne, Cardinal Richard archevêque de Paris officiant. Mon Père, Sophie et Charles, Louise, Henri, André et moi assistons à la cérémonie.Je suis extrêmement touché de l'excellente tenue de Paul. Le pauvre enfant très impressionné déjà depuis quelques jours est figé pendant toute la cérémonie dans une immobilité un peu triste mais si attentive! Lui l'enfant si distrait d'ordinaire et si pétulant! Le soir au dîner mon Père, Adèle et ses enfants Anna et Joseph, Jeanne et Pierre, Etienne et Mathilde, Geneviève et Charles M. et Mme de la Gillardaie.

Mardi 10 Mai

Banquet de l'atelier Questel Pascal. Création d'une société amicale des élèves anciens et nouveaux. Soirée charmante et très amusante. Concert projections, monologues, etc organisés par les élèves de l'atelier.

Mercredi 11 Mai

Louise se fait inscrire pour l'examen du brevet élémentaire. Elle passera le 16 Juin la première série! Samedi matin 8h1/4 Orthographe, Rédaction; soir 1h arithmétique, écriture.

Vendredi 13 Mai

Le pauvre petit Georges se fait une blessure affreuse à la figure. Nous étions à déjeuner. Il nous quitte en courant vers la chambre. Tout à coup nous entendons un grand cri, nous nous précipitons. Sophie ramasse le pauvre enfant déjà tout couvert de sang. Une plaie d'environ 3cm lui fendait la partie inférieure de la joue, la plaie était béante la partie supérieure faisait saillie d'environ un centimètre. Entre les 2 bords de la plaie la chair coupée à vif laissait voir un trou profond, c'était affreux. Nous envoyons immédiatement chercher le Dr Bruslé qui vient presqu'aussitôt. En l'attendant Sophie maintient avec une éponge les 2 bords de la plaie. Le docteur fait un pansement à l'acide phénique, puis entrecroise sur la plaie des petites bandes de linge-charpie maintenues collées avec du collodion. Il met ensuite un tampon d'ouate et entoure fortement la tête avec des bandes et sur le tout un bonnet. Le pauvre petit qui s'était endormi sur les genoux de sa mère se réveille pendant le pansement et se débat en criant. Il s'amuse ensuite avec les jouets qu'on est allé lui chercher, puis demande à manger. Vers 4heures il se rendort, on le couche. Il dort toute la nuit sans se réveiller. Il ne se réveille que passé 6 heures du matin, après plus de 14 heures de sommeil ininterrompu.

Mercredi 18 Mai

Eté avec Sophie à l'enterrement d'Henri Vannier décédé à l'âge de 41 ans d'un épanchement cérébral à la suite d'un coup qu'il s'est donné à la tète. Le cousin H. Vannier était chef de section à la Cie des Chemins de Fer de l'Ouest.

Jeudi 19 Mai

Je vais avec les enfants Charles, Henri et André au cercle vélocipédique de Bullier. Je prends ma troisième leçon ou plutôt ma deuxième, car dès le début de la deuxième leçon je m'étais foulé le pied et m'étais trouvé dans l'impossibilité de continuer. Je commence à aller seul. Charles va très bien. Henri et André commencent à aller seuls. Paul retenu au lycée n'était pas venu.

Dimanche 22 Mai

Eté travailler à la Cour des Comptes. Aquarelle au premier étage sur la rue de Lille. Sophie et les enfants viennent m'y rejoindre après la leçon de danse chez Mme Raulin.

Dimanche 29 Mai

Concert des élèves du cours Pierné, 7 rue Christine. Louise joue une barcarolle de G. Pierné et s'en acquitte très bien.

Lundi 30 Mai

Matin au Salon des Champs Elysée pour le vote de la Médaille d'Honneur de la Section d'Architecture. Votants 97.

Premier tour Cordonnier 34 voix pour son beau projet de la Bourse d'Amsterdam, Ch. Normand 33 voix pour le relevé et projet de restauration du Parthénon.

Deuxième tour Cordonnier 44 voix, Ch. Normand 33 voix. La majorité absolue étant de 47 voix il n'y a pas lieu à médaille d'honneur.

Incident Normand. Après la proclamation du vote Alf. Normand père s'emporte déclarant que c'est inique, qu'il y a coterie montée, que si son fils avait été pensionnaire on lui eut décerné la médaille d'honneur... bref il fait une sortie des plus violentes et des plus déplacées à laquelle son fils Ch. Normand s'associe avec assez peu de tact et beaucoup de ridicule. J'avais voté pour Cordonnier estimant que la médaille d'honneur doit aller à une composition plutôt qu'à un travail archéologique. L'architecte se révèle vraiment dans la composition et l'exécution de son oeuvre. Il ne faudrait donc décerner la médaille d'honneur qu'à un artiste ayant fait ses preuves, sorte de couronnement d'une carrière artistique bien remplie ou à une oeuvre absolument remarquable. L'oeuvre de Cordonnier ne comportait encore qu'une composition mais il y avait un intérêt français en jeu. A Amsterdam on cherchait à éliminer le Français pour donner la construction à un Hollandais. L'obtention de la médaille d'honneur pouvait donner à Cordonnier une force nouvelle pour lutter contre ceux qui voulaient le déposséder de ses droits.

Vendredi 3 Juin

Eté passer la journée à Blois. Parti à 9h15, arrivé à midi. Déjeuner avec Beau, visite des travaux. Visite à l'évêque et au préfet (pas rencontrés). Bain froid sur la Loire. Revu un ancien camarade d'atelier. Dîné chez Beau. Quitté Blois à 8 1/2, rentré à Paris à minuit.

Dimanche 5 Juin (Pentecôte)

Après midi été avec Sophie et les enfants, sauf Emile et Georges à Chatou. Visite à Mme Lussigny que nous ne rencontrons pas. Promenade sur le bord de l'eau. Repartis par le train de 6h. Nous sommes ravis de la promenade. Temps un peu couvert mais très agréable.

Lundi 6 Juin

Charles et Henri vont au Français voir Polyeucte et Le Menteur. Mounet-Sully joue le rôle de Polyeucte, Got le rôle de Cliton dans le Menteur.

Mardi 7 Juin

Je vais à l'Hôtel Continental à la soirée de contrat de M. Georges Fromageot (Comédie).

Dimanche 12 Juin

Emile et Georges sont en pleine coqueluche. Emile est pris depuis environ 3 semaine, Georges depuis 15 jours. André tousse également depuis 8 jours mais sa coqueluche est moins déclarée, si peu même que nous continuons à l'envoyer au lycée. Il n'a pas de quintes.

Lundi 13 Juin

Eté passer la journée à Villarceaux au château de M. L. Cartier pour certains travaux en cours. Départ à 6h10 du matin retour à 5h30. Eté ensuite à Sceaux rejoindre la famille. Nous étions invités chez Etienne pour fêter l'anniversaire de leur mariage.

Mardi 14 Juin

Eté passer la journée à Monnerville à la ferme de Mme Corbin.

Mercredi 15 Juin

Dans la matinée je vais rejoindre Gd André au restaurant Ledoyen aux Champs-Elysées. Nous déjeunons ensemble et allons ensuite faire un tour du Salon.

Jeudi 16 Juin

Premier examen de Louise. A 8h du matin je conduis, avec Sophie, Louise à l'Hôtel de Ville pour les premières épreuves de son examen pour le Brevet Elémentaire. Composition française et dictée. Sujet de la composition française: Que préférez-vous, les Lettres ou les Sciences, et pourquoi? Dictée, un passage de Chateaubriand.

Après midi à 1h Louise retourne à l'Hôtel de Ville. Composition de calcul: problème et théorie.

Page d'écriture. Dans la soirée même on connaît les résultats des 4 épreuves. Louise est admissible (ce qui ne nous surprend aucunement). Elle passe samedi les épreuves de dessin et de couture et probablement lundi les épreuves orales.

Samedi 18 Juin

8h du matin je conduis Louise à l'Hôtel de Ville pour les examens de dessin et de couture. Pour le dessin elle a comme modèle un tabouret (d'après nature). Pour la couture à repriser un morceau de calicot très dur. Louise est admissible.

Dimanche 19 Juin

Matinée chez Mme Raulin. Soir dîner à la maison: Raulin, Gaspard, André, Flachiron et Montfort. Deslignères qui n'a pu accepter vient le soir.

Mardi 21 Juin

Louise passe l'examen oral. Elle est reçue. Cette brave petite fille a beaucoup travaillé toute l'année.

Lundi 27 Juin

Eté passer la journée à Villarceaux.

Vendredi 1er Juillet

Visite d'H. Rousseau; nous passons l'après-midi ensemble.

Henri mon frère vient passer la journée à Paris. Je dîne avec lui chez Père à l'Institut avec Adèle, Anna et Joseph, P. Petit et Ch Rabut.

Vers la fin du dîner grand tumulte sur le quai, foule immense courant et poussant des cris. Nous descendons aux renseignements. On nous dit que 2 jeunes gens viennent de jeter une femme à l'eau après l'avoir assassinée dans une barque. quelques instants après nous voyons refluer la foule entourant des sergents de ville tenant au collet deux hommes dont l'un très jeune, 18 ans environ avait une bonne figure sympathique et douce. La foule les poursuivait hurlant, les invectivant et frappant, les agents avaient toute la peine du monde à les protéger, à les empêcher d'être lynchés. Ce spectacle était ignoble. Je n'ai jamais rien vu d'aussi écoeurant d'aussi lâche. Frapper des gens hors d'état de se défendre! Le lendemain j'apprends que ces soi-disant assassins étaient de braves pêcheurs à l'épervier qui ayant eu une contestation avec une femme qui baignait son caniche avaient jeté en matière de plaisanterie leur épervier sur le toutou et aspergé du même coup la commère! qui se mit à crier, à l'assassin arrêtez-les! Les sergents de ville arrivant les pêcheurs gagnèrent le large et alors commença une course homérique sur la Seine et les deux rives de la Seine, du pont de Solférino à Charenton et de Charenton au quai Malaquais où les malheureux vinrent échouer traqués par des barques chargées d'agents et par les bateaux-mouches qui se mirent de la partie.

Mardi 26 Juillet

Charles subit les épreuves écrites du baccalauréat.

Jeudi 28 Juillet

7h45 départ de la famille pour les Dalles. Je reste à Paris avec Charles qui subit les épreuves du baccalauréat et attend les résultats de l'admissibilité.

Samedi 30 Juillet

Le soir été à Sceaux avec Charles dîner chez Etienne.

Vendredi 5 Août

7h45 du matin départ pour les Dalles y conduisant mes nièces Adèle et Jeanne Petit, Marie et Pauline Deltombe.

Mardi 9 Août

5h du matin départ des Dalles

Mercredi 24 Août

Mort de M. Léon Renard. 1h10 départ pour les Dalles.

Vendredi 26 Août

Sur une dépêche de M. P. Lelong je vais à Paris. Quitté les Dalles à 5h du matin, arrivé à Paris 11h20; reparti 1h10, rentré aux Dalles le soir.

Allers et retours entre les Petites Dalles et Paris

Lundi 26 Septembre

Marguerite prise de douleurs depuis 2 jours met au monde une petite fille avant terme (6mois 1/2) L'enfant meurt 1/2 heure environ après sa naissance.

Je quitte les Dalles à 5h1/2h du soir pour rentrer définitivement à Paris.

Mardi 27 Septembre

Enterrement de la petite fille de Marguerite.

Jeudi 3 Novembre

Charles passe les épreuves écrites du baccalauréat de Rhétorique.

Vendredi 4 Novembre

Charles admissible passe les épreuves orales. Il est admis.

Les examinateurs sont: MM. Larronnet: Français, Histoire, Géographie; Gazier: Grec et Latin; Chuquet: Allemand; Foussereau: Mathématiques.

Dimanche 6 Novembre

Sophie, Louise, Charles et Henri vont au concert Lamoureux (Champs Elysée) entendre la Symphonie Pastorale.

Mardi 15 Novembre

Voyage à Blois. Départ 9h15 arrivée à Blois midi. Déjeuner avec Beau. Visite des travaux de la cathédrale et de l'Evêché. Visite à l'Evêque pas rencontré. Retour à Paris minuit.

Jeudi 17 Novembre

Entrée des Français à Abomey, capitale du Dahomey. Fuite du roi Behangin. Brillante campagne menée par le Colonel Dodds nommé Général de Brigade.

Lundi 21 Novembre

Loué une loge première galerie à l'Opéra-Comique, 6 places: Sophie et Louise, Adèle et Anna Guibert, Jeanne et Adèle Petit. Je prends un fauteuil d'orchestre. On joue le Barbier de Séville et Cavalliera rusticana.

Mardi 6 Décembre

Je fais St Nicolas. Drapé d'un grand couvre-lit rouge et d'une serviette en pèlerine sur laquelle nous avons collé des étoiles en papier d'argent, le visage recouvert d'un masque avec grandes lunettes d'or et barbe blanche, coiffé d'une mitre en papier que j'avais découpée et illustrée, j'apparais aux petits frères émerveillés portant sous mes bras des jouets et dans mes poches des bombons et différentes petites choses.

Depuis longtemps on avait annoncé aux chers petits que la fête de St Nicolas approchait et qu'il apportait lui-même des joujoux aux enfants sages. Chaque fois que je sortais on me demandait si je rencontrerais St Nicolas et quand je rentrais on ne manquait jamais de s'informer du grand Saint. Ce jour-là j'avais prévenu qu'il arriverait à 6h du soir et sonnerait 3 coups. A mes 3 coups de sonnette on accourut... tableau. Pour ne pas me faire reconnaître je parlais en récitatif et en creusant ma voix.

Dimanche 18 Décembre

Le Marquis et la Marquise de Villefranche ayant mis leur loge du Conservatoire à la disposition de ma famille j'offre une des 4 places à mon Père et les 3 autres à Sophie, à Louise et à Charles.

Ils ont eu un très beau concert: Roméo et Juliette de Berlioz, concerto pour violon de Beethoven, Le Christ au Mont des Oliviers de ???. J'envoie pour que la partie soit complète Henri, Paul avec leur cousin A. Deltombe qui déjeunait avec nous, au concert Lamoureux.

Quant à moi je vais à la Société Centrale pour les élections annuelles. Je suis élu le premier au Conseil par 160 voix sur 163 votants. N'ayant pas voté pour moi, il n'y a donc que 2 voix qui me manquent pour être élu à l'unanimité. Je suis extrêmement touché de cette marque de sympathie de mes confrères. J'avais eu cependant dans ces derniers temps, à l'occasion du projet de loi sur l'Opéra-Comique, à protester contre l'attitude de certains des principaux membres du Bureau et par 2 fois dans 2 séances du Conseil mené une discussion assez ardente.

Mardi 20 Décembre

Je vais avec Sophie faire visite à la Marquise de Villefranche pour la remercier de sa loge du Conservatoire nous ne la rencontrons pas.

Jeudi 22 Décembre

Sophie va avec Louise, Charles, Henri, Paul et André au concert du Lycée louis le Grand. Ovation faite à Gounod qui dirige l'orchestre à plusieurs reprises pour l'audition de plusieurs de ses compositions. Les enfants reviennent enchantés du concert.

Mardi 27 Décembre

Jubilé de Pasteur. Séance très émouvante dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, présidée par le Président de la République M. Carnot, et en présence des Présidents des Chambres, des ministres et corps diplomatique et de toutes les sommités littéraires, scientifiques, artistiques, politiques, etc. Nombreuses délégations des Universités de France et de l'Etranger. J'assiste à cette belle séance et en suis vivement impressionné. Dès l'entrée de Pasteur conduit par le Président de la République jusqu'à la fin du défilé des délégations l'enthousiasme et l'émotion sont des plus grands. C'est une des grandes émotions de ma vie. C'est solennel et empoignant.

Jeudi 29 Décembre

Eté le matin patiner sur le lac de St Mandé avec Louise, Henri Paul et André.

Vendredi 30 Décembre

Après midi été avec Louise patiner à Fontenay/Bois. Le matin Louise était allée au manège. Les enfants entrent en vacances. Sortis le soir à 4h ils rentreront le Vendredi matin 6 Janvier. Henri et Laure viennent à Paris passer 2 jours. Ils descendent chez nous. Louise cède sa chambre et occupe ainsi qu'André la chambre de Charles et Henri. Charles et Henri descendent coucher dans mon cabinet.

Père, Ch. Rabut, Etienne et Mathilde, Henri et Laure et Malassez dînent à la maison.

Samedi 31 Décembre

Les enfants, Charles, Henri, Paul et André, vont l'après-midi patiner au Bois de Boulogne.